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Liens hypertexte

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Est-il possible de souscrire à une offre d'un moteur de recherche proposant d'acquérier un lien sponsorisé sans aucun risque ?

Un lien hypertexte est définit comme un "système de renvois permettant de passer directement d'une partie d'un document à une autre, ou d'un document à d'autres documents choisis comme pertinents par l'auteur" (Commission générale de terminologie et de néologie, Avis, Liste des termes, expressions et définitions adoptés. Vocabulaire de l'informatique et de l'Internet : JO 16 mars 1999). Depuis quelques années, les moteurs de recherche ont mis en place des liens hypertextes permettant un affichage, en première page des résultats, du site dont l’annonceur aura acquis des droits sur un mot-clé, dès lors que celui-ci aura été mentionné dans la recherche de l’internaute. Il s’agit de la pratique dite des liens sponsorisés. La Jurisprudence s’est interrogée sur la possibilité d’acquérir ainsi un lien sponsorisé correspondant à la marque de l’un de ses concurrents. Indépendamment de l’hypothétique responsabilité du moteur de recherche, la Jurisprudence a eu l’occasion de sanctionner les annonceurs. Ainsi la Cour d’appel de Versailles la première condamnée des annonceurs à raison du fait qu'ils exerçaient des activités identiques à celles des plaignants et qu'en choisissant la marque de ces derniers, ils avaient commis des actes de contrefaçon (CA Versailles, 12e ch., 23 mars 2006, Google c/ CNRRH : Juriscom.net). Cette solution a été reprise notamment par le Tribunal de grande Instance de Lyon (TGI Lyon, 3e ch., 13 mars 2008, Rentabiliweb Europe c/ Google, Clic-event et a. : Juriscom.net).

Cependant ce courant de jurisprudence est contesté ; la Cour d’Appel de Paris a ainsi écarté toute responsabilité de l’annonceur (CA Paris 1er février 2008). C’est dans ces conditions que, alors même qu’elle était saisie de cette problématique, la Cour de Cassation a préféré poser une question préjudicielle à la Cour de Justice des Communautés Européennes, au regard de articles 5 § 1 a) et b) de la directive n° 89/104/CEE du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des États membres sur les marques, et de l’article 9 § 1 a) et b) du Règlement (CE) n° 40/94 du 20 décembre 1993. La question préjudicielle posée par la Cour de Cassation est la suivante : la réservation par un opérateur économique, par voie de contrat de référencement payant sur Internet, d'un mot-clef déclenchant en cas de requête utilisant ce mot, l'affichage d'un lien proposant de se connecter à un site exploité par cet opérateur afin d'offrir à la vente des produits ou services, d'un signe reproduisant ou imitant une marque enregistrée par un tiers afin de désigner des produits identiques ou similaires, sans l'autorisation du titulaire de cette marque, caractérise-t-elle en elle-même une atteinte au droit exclusif garanti à ce dernier ? Au jour de la rédaction de cet article seules les conclusions de l’Avocat Général Poiares Maduro sont connues. Celui-ci est d’avis que Google n’a pas porté atteinte aux marques en permettant aux annonceurs de sélectionner, dans AdWords, des mots clefs correspondant à des marques.Il souligne que l’utilisation des marques se limite à la sélection de mots clefs, qui est interne à AdWords et ne concerne que Google et les annonceurs. Lors de la sélection de mots clefs, il n’y a donc aucun produit ou service vendu au public. Un tel usage ne peut dès lors pas être considéré comme un usage fait pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux que couvrent les marques. De même, les annonceurs eux-mêmes ne se rendent pas coupables de contrefaçon de marque en sélectionnant dans AdWords des mots clefs correspondant à des marques. L’arrêt de la CJCE devrait être rendu dans les prochaines semaines.


Guillaume BARDON
Avocat à TOURS