INTRODUCTION
1. Les sources légales et jurisprudentielles du droit du licenciement pour motif personnel suscitent un éveil constant et l’épreuve que constitue la recodification[1], n’est probablement à cet égard qu’un nouvel épisode d’une saga qui continuera vraisemblablement.
2. Il faut réapprendre nos gammes à partir du Livre II intitulé Contrat de travail de la première partie relative aux relations de travail sous un chapitre I (Dispositions générales) du Titre III intitulé Rupture du Contrat de Travail à durée indéterminée.
3. Indépendemment de l’effort d’adaptation que ce nouvel ordre des règles impose, notamment pour mémoriser les nouveaux articles à 4 chiffres, la recodification ne bouleverse nullement le droit du licenciement pour motif personnel.
Le changement à venir dépend beaucoup plus du projet de loi du 29 Mars 2008 qui transforme « la flexisécurité » à la française en réalité dans le sillage de l’accord national sur la modernisation du marché du travail signé à la surprise générale le 11 janvier 2008 par 4 organisations syndicales représentatives sur 5 (à l’exception de la CGT) suivant une évolution sensible de méthode privilégiant la négociation.
Les partenaires sociaux, au prix de compromis, ont énoncé toute une série de mesures éparses destinées à « sécuriser les emplois et améliorer le retour à l’emploi » sous les articles 11-12 et 13 destinées :
1- à recadrer et sécuriser les ruptures du contrat de travail avec l’obligation de motiver le licenciement, améliorer la lisibilité des droits contractuels, la création d’une indemnité de rupture, la réhabilitation du reçu pour solde de tout compte, la révision de la procédure prudhommale avec l’obligation d’adresser au défendeur l’objet de la réclamation avant la saisine, la fixation d’un éventuel plafond et d’un plancher pour les dommages intérêts susceptibles d’être alloués en cas de licenciement.
2- à privilégier les solutions négociées à l’occasion des ruptures du contrat de travail avec deux types de technique :
- la première qui constitue la mesure phare de l’accord « la rupture conventionnelle matérialisée » par un formulaire type encadrée par des techniques garantissant tant le consentement avec un délai de rétractation et la nécessité d’une homologation par le directeur départemental du travail que l’indemnisation avec l’assurance du bénéfice des indemnités de ruptures et des allocations chômage
- la seconde avec la rupture pour la réalisation de l’objet défini au contrat dont bénéficierait à titre expérimental les ingénieurs et cadres après avoir conclu un CDD à terme incertain d’une durée de 18 mois minimum et de 36 mois maximum conclu pour objet défini. La particularité résidant dans la possibilité de la rupture d’un montant égal à 10% de la rémunération totale brute du salarié et non assujettie aux prélèvements sociaux.
3- à organiser la prise en charge soit par l’entreprise, soit par un fond de mutualisation à charge de l’employeur des indemnités de ruptures dues aux salariés dont le contrat est rompu pour inaptitude d’origine non professionnelle.
4. Le processus de validation de l’accord est en marche. Le projet de loi précédé d’un exposé des motifs met en œuvre les clauses de l’accord relatives à la « rupture conventionnelle ». En filigrane de la réforme il y a la volonté affichée d’éviter, le coût, les lenteurs et les aléas du procès prudhommal.
Mais a-t-on bien pris le temps pour prendre la réelle mesure des questions posées quant à la protection du libre consentement et aux moyens financiers nécessaires pour permettre à l’administration de remplir son office ?
Ne risque-t-on pas, à terme, de voir naître de nouveaux contentieux générés par la remise en cause des ruptures conventionnelles ?
N’existe-t-il pas, en germe, une tentation de recours massif à un nouveau mode de rupture de nature à augmenter plutôt qu’à diminuer le volume du chômage ?
5. Au-delà de l’effet d’annonce, le retour de flamme n’est pas impossible. En attendant l’expérimentation, reconnaissons au juge un mérite immense, celui de remettre en permanence - confronté à un droit complexe- le métier sur l’ouvrage en affichant ses positions et en innovant qu’il s’agisse des conditions de forme et de fond, du contrôle de la qualification, des sanctions applicables aux licenciements irréguliers ou invalides concernant des salariés ordinaires ou protégés.
Les décisions se succèdent, défilent, au point de nous donner le tournis, de défaire ce qui nous semble fait et de nous faire perdre la notion du temps.
Qui peut se permettre d’invoquer une jurisprudence constante ? Qu’est-ce que l’actualité jurisprudentielle ? Celle du jour, du mois, du trimestre ou de l’année ?
Accordons nous le recul nécessaire pour traiter l’essentiel de l’actualité de 2006, 2007 et du début 2008 des arrêts de la Cour de Cassation tant il parait risqué à raison de la dispersion et de l’arbitraire de la sélection de nous livrer à la dissection des décisions des juges du fond.
Au prix d’un choix inévitablement incomplet des décisions à priori les plus significatives, l’analyse de la jurisprudence la plus récente confirme le constat suivant: licencier un salarié pour motif personnel constitue une opération à haut risque pour l’employeur dont l’initiative est bridée (I). Raison majeure qui conduit à redouter l’office du juge (II) au point de préférer l’évincer en expérimentant la voie de la « rupture conventionnelle » qui circonscrit l’opération de séparation aux seules parties concernées.
I : L’initiative bridée de l’employeur
6. Initier le licenciement d’un salarié impose à l’employeur de se glisser dans un moule tant sur la forme que sur le fond. Dans la nouvelle codification l’ordre chronologique énonce la règle de fond avant d’échelonner les phases procédurales au terme del’article L 1232-1 CT « Tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ». Suivent ensuite des règles formelles relatives à l’entretien préalable, la notification du licenciement puis le conseiller salarié. Inversant la chronologie légale passons en revue les deux freins à l’initiative que sont le formalisme et l’objectivation du motif de licenciement.
A : Le formalisme
7. Ni la force majeure[2], ni l’existence de liens familiaux entre un salarié et son employeur[3] ne dispensent de respecter les règles relatives au droit du licenciement qu’il s’agisse de l’entretien préalable ou de la notification de la lettre de licenciement.
1. L’entretien préalable
8. La nouvelle codification des articles L 1232-2 à L 1232-5 CT ne modifie pas les règles. La jurisprudence précise seulement les modalités pratiques afférentes à la convocation comme au déroulement de l’entretien.
a. Convocation
9. Les nouvelles technologies permettant d’accélérer les communications, la tentation est grande de vouloir substituer à l’envoi d’une lettre recommandée, voir à la remise suivant décharge, un envoi par mail ou par télécopie. L’accueil jurisprudentiel de la démarche n’est guère favorable : « L’envoi de la lettre de convocation à l’entretien préalable par télécopie ne peut pallier l’inobservation des prescriptions légales »[4]. Procède d’une même inspiration, consistant à marginaliser la portée d’un courriel, le refus de considérer son envoi par un supérieur hiérarchique en réponse à un mail de protestation de son subordonné comme une prédisposition de licenciement rendant irrégulière la procédure qui s’en est suivie[5]
10. Le formalisme de rigueur est pleinement justifié pour des raisons élémentaires de preuve. Ni le courrier électronique, ni la télécopie même assortie d’une demande d’accusé de réception ne permettent de s’assurer que le salarié a pris personnellement connaissance de la convocation à la date déterminée qui fait courir le délai de 5 jours. Le point de départ de celui-ci étant le lendemain du jour de la remise de la lettre, étant rappelé que le dimanche qui n’est pas un jour ouvrable ne compte pas[6].
b. Déroulement
11. Au cours de l’entretien préalable l’employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié (art. L 1232-2 CT). Le texte est laconique et peu explicite sur l’objet de l’entretien. S’agit-il d’un temps de réel débat ou de la succession de deux monologues ?
L’obligation qui pèse sur l’employeur d’informer du motif de la mesure envisagée et de recueillir des explications n’entraîne pas l’obligation d’engager une réelle discussion sur le bien fondé, voir l’opportunité de l’éventuel licenciement[7].
Il ne s’agit donc pas dans l’esprit du législateur d’instaurer un « dialogue social individuel » dont l’objet serait d’apaiser un climat tendu ou de négocier une sanction moins sévère. L’employeur a seul compétence en vertu de son pouvoir disciplinaire pour qualifier les faits et décider de la sanction qui lui paraît opportune de notifier.
2- La notification
12. Les modalités de notification de la rupture hier dispersées sous les anciens articles L 122-14-1 et L 122-14-2 CT et sont désormais rassemblées dans un texte unique[8]. La forme et la motivation de celle-ci appellent quelques précisions.
a. Forme
13. L’envoi d’une feuille blanche ne constitue pas la notification d’un licenciement. Il ne peut être suppléé à la défaillance constatée par la remise au salarié en main propre d’une lettre[9] . La Cour de Cassation entend ainsi déjouer et anéantir les montages frauduleux auxquels se livrent parfois les parties à l’occasion des ruptures amiables faussement qualifiées de licenciement suivies d’une transaction.
L’enveloppe adressée au salarié est vide lorsqu’elle est réceptionnée, ce qui permet aux parties de signer une transaction et de remettre à cette occasion la lettre de licenciement pour ne pas s’exposer au risque de se voir reproché d’avoir antidaté la transaction. Et le tour est joué. Par son arrêt du 24 janvier 2007 destiné aux honneurs du « Bulletin » la Cour de Cassation adopte au prix d’une politique « d’opération main propre » la sanction la plus sévère en considérant que l’envoi d’une feuille blanche fusse-t-il suppléé par la remise ultérieure d’une lettre au salarié caractérise un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Autant dire que les praticiens trouveront dans la nouvelle technique de la rupture conventionnelle le moyen d’échapper aux fourches caudines de la Cour suprème.
b. Motivation
14. L’employeur doit énoncer le motif de licenciement pour permettre ensuite au juge d’exercer son contrôle. L’exigence est essentielle dès lors que, selon la Cour de cassation la qualification que l’employeur donne au licenciement s’impose à lui[10]. Dans un arrêt du 10 juillet 2007 la chambre sociale de la Cour de cassation invite à s’interroger sur l’importance de la datation des griefs reprochés au salarié au regard de l’obligation d’énoncer le motif.
Les juges du fond avaient jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse en l’absence de fait précisément daté dans la lettre de licenciement. La Cour de cassation les censure nettement, décidant que la datation dans la lettre de licenciement des faits invoqués n’est pas nécessaire, ajoutant que les juges du fond ont l’obligation d’examiner l’ensemble des griefs invoqués par l’employeur [11].
c. Prise d’effet
15. La rupture se situe à la date où l’employeur manifeste sa volonté d’y mettre fin, c'est-à-dire au jour de l’envoi de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Les dates ont une grande importance. Une difficulté particulière se présente lorsque la lettre est adressé à un salarié en arrêt de travail en raison d’un accident du travail. En ce cas, lorsque la lettre de licenciement parvient au salarié le premier jour de son arrêt l’effet du licenciement est reporté à l’expiration de la période de suspension du contrat de travail consécutive. Est écartée la solution consistant à situer la rupture au jour de la réception de la lettre qui aurait conduit à prononcer la nullité du licenciement. La solution est logique tant il serait injuste de reprocher à l’employeur de ne pas avoir pris en considération une situation qu’il ignore nécessairement au moment où il prend sa décision et prononce le licenciement. La protection exceptionnelle à laquelle peut prétendre un accidenté du travail est liée à la suspension du contrat[12].
C’est également au jour de la notification du licenciement par l’employeur et non au jour de la réception par le salarié qu’il faut se placer pour déterminer les droits de ce dernier qu’il s’agisse du calcul de l’ancienneté ou du montant de l’indemnité[13].
16. Mais ne notifie pas qui veut. En présence d’une clause d’un règlement intérieur prévoyant que le licenciement d’un directeur d’établissement géré par une association doit être le fait du conseil d’administration de celle-ci, le manquement à cette règle insusceptible de régularisation postérieure rend le licenciement opéré à tord par le président de l’association sans cause réelle et sérieuse. Le fait qu’un président excède ses pouvoirs ne constitue pas une simple irrégularité de procédure mais affecte directement l’existence d’un motif réel et sérieux.
Autant dire que les représentants d’association ont intérêt à lire et relire les statuts ou le règlement intérieur puisque « le respect de la collégialité de la décision exigée constitue une condition de fond de la rupture et une garantie offerte au salarié »[14].
La forme et le fond interfèrent pour se fondre dans un tout indissociable. Il ne suffit pas de notifier une lettre motivée. Encore faut-il alléguer un motif marqué du sceau d’une objectivité incontestable.
B- Le motif
17. L’exigence d’une motivation du licenciement, imposée à partir de 1973[15], doit permettre au salarié de connaître les motifs qui lui sont reprochés. Le législateur ne se contente pas d’imposer une motivation précontentieuse qui ne serait l’objet que d’un contrôle prima facie. Il lui donne un contenu que le juge sera éventuellement chargé de contrôler. La recodification offrait l’occasion de définir le motif réel et sérieux. Il n’en est rien (art. L 1232-1 CT). Le standard juridique reste le même, toujours aussi imprécis, laissant au juge la mission monopolistique de lui donner un contenu. Quelque soit la qualification ou la nature du motif, qu’il soit simplement sérieux ou constitutif d’une faute grave ou lourde, il s’induit des décisions de jurisprudence une constante exigence tendant à objectiver le motif. Elle répond en cela aux vœux émis dès l’origine des débats parlementaires par le ministre du travail[16].
Peu importe la nature du motif qu’il soit ou non inhérent à un manquement contractuel du salarié.
1- En présence d’un manquement
18. Le manquement du salarié à ses obligations contractuelles peut relever ou non du domaine du droit disciplinaire.
a. Disciplinaire
19. La faute, le manquement à la discipline doit présenter un certain degré de gravité troublant la relation de travail. La cause sérieuse de licenciement s’entend d’un fait susceptible de porter atteinte de façon permanente et dommageable au bon fonctionnement de l’entreprise[17]. Raison pour laquelle on voit progressivement se renforcer la sphère d’intimité du salarié fut-ce au prix du sacrifice des principes que la morale élémentaire impose de respecter[18].
Dans son état le plus récent la Cour de cassation nous livre quelques exemples gradués dans la qualification de fautes disciplinaires admises mais aussi d’exclusion catégorique du domaine du pouvoir répressif de l’employeur.
La violence[19], la violation des exigences de sécurité[20], le refus d’obéir à des instructions[21], le mensonge excessif ou calomnieux[22] ainsi que la répétition d’un comportement négligent[23] constituent des fautes graves.
- Sur le terrain de la faute disciplinaire deux évolutions récentes méritent d’être soulignée. La cour de cassation décide qu’est fondé le licenciement du salarié qui part en congé sans le déclarer, nonobstant la défaillance de l’employeur qui s’abstient de répondre aux demandes d’organisation des départs[24]. La jurisprudence antérieure s’avérait plus sévère considérant le licenciement sans cause réelle ni sérieuse[25]. La solution est identique en présence d’un refus par le salarié du changement de ses conditions de travail[26].
20. Enfin, ne permet pas de fonder une rupture, le vol véniel sur la voiture d’un collègue[27], le dénigrement de la hiérarchie pouvant s’expliquer par des difficultés professionnelles[28], la non présentation d’un titre de séjour pour un ressortissant communautaire[29] ou encore des agissements qui pouvant être en soi, jugés graves ou déplacés, relèvent de la vie personnelle[30]. Dès que les droits de la personne sont en cause, il appartient à l’employeur qui entend reprocher une faute disciplinaire de démontrer en quoi le trouble créé, qui ne se suffit pas à lui-même, caractérise un comportement fautif eu égard à la fonction du salarié et à la nature de l’entreprise[31].
Le pouvoir de direction se réduit également en présence d’un motif non disciplinaire.
b. Motif non disciplinaire
21. Les arrêts relatifs à l’insuffisance de résultat subordonnent la validité du motif à la réunion de deux conditions cumulatives. Les objectifs contractualisés ou non doivent être réalistes et la non réalisation doit être imputable à la faute du salarié qui ne se plie pas aux remarques réitérées de son employeur. La Cour de cassation vient de le rappeler récemment[32]. Mais l’insuffisance, qu’elle soit circonscrite aux résultats, ou plus largement qualifiée de professionnelle, ne peut être désormais invoquée qu’à la condition de pouvoir démontrer que la nature de l’activité commerciale ou non ne présente aucune difficulté technique et dans la négative qu’aucun manquement n’est susceptible d’être reproché à l’employeur quant à son obligation d’assurer l’adaptation du salarié à son poste et de veiller au maintien de sa capacité à occuper l’emploi. Tout manquement rend le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et expose l’employeur à devoir réparer un préjudice distinct de celui qui résulte de la rupture[33].
22. La question se pose de savoir si l’on peut, nonobstant l’obligation spécifique d’adaptation des salariés à leur poste de travail , (art. L 6321-1CT) reprocher à un employeur de ne pas avoir pris l’initiative d’actions de formation notamment en présence d’une entreprise dispensée d’établir un plan de formation et alors que la mise en œuvre du droit individuel de formation relève de l’initiative du salarié en accord avec son employeur (art. L 6323-9 CT).
La réponse varie suivant que l’obligation de formation du salarié procède ou non de l’exécution loyale et de bonne foi du contrat de travail[34].
Une conception par trop extensive de cette obligation comporte en germe le risque majeur de pénaliser les petites entreprises et d’entraver le droit de licencier en faisant peser sur l’employeur la responsabilité d’une insuffisance matériellement établie du salarié.
2- En l’absence de manquement
23. En l’absence de tout manquement aux obligations contractuelles du salarié, sa situation personnelle (a) ou la nature même du contrat (b) permettent de justifier un licenciement.
a. A raison de la situation personnelle du salarié
* inaptitude professionnelle
24. Le licenciement pour inaptitude professionnelle doit respecter une procédure stricte sauf à être annulé[35]. La difficulté essentielle reste celle des exigences drastiques posées par la Cour de cassation quant à l’obligation de reclassement applicable à tout contrat à durée déterminée[36] ou à durée indéterminée, devant s’effectuer à l’intérieur du groupe auquel appartient l’employeur parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation lui permettent la permutation de tout ou partie du personnel, et ce même en présence de l’avis du médecin du travail déclarant le salarié inapte à tout emploi dans l’entreprise auquel doit être assimilé l’avis d’inaptitude à tout travail[37]. Certaines limites se dessinent cependant : l’employeur n’a pas à créer un poste pour les besoins du reclassement[38] et ne peut être tenu d’imposer à un autre salarié une modification de son contrat de travail à l’effet de libérer son poste pour le proposer au reclassement du salarié inapte[39]. Quid s’il s’agit d’une simple modification des conditions de travail ? Imposer une telle distinction serait porteuse d’insécurité juridique tant la distinction entre modification des tâches qui relèvent des conditions de travail et modification de la fonction qui affecte le contrat est subtile et source d’interprétation délicate[40].
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* Absence prolongée et nécessité de remplacement
25. Coup sur coup les 26 septembre et 28 octobre 2007 la Cour de cassation a resserré les brides relatives aux conditions du licenciement causé par les perturbations dues à l’absence pour maladie prolongée. Il est désormais nécessaire, d’une part de mentionner dans la lettre de licenciement outre la perturbation du fonctionnement de l’entreprise, la nécessité du remplacement du salarié absent en raison de son état de santé[41] et, d’autre part, l’employeur est tenu procéder au remplacement définitif du salarié absent, lequel ne peut s’entendre que de l’embauche d’un autre salarié excluant ainsi le recours classique au CDD ou à un contrat de travail temporaire voir à une entreprise prestataire de services [42].
Critiquant la décision, le professeur Savatier « ne voit pas pourquoi le recours à une entreprise prestataire de services pour lui confier les tâches incombant antérieurement au salarié licencié donnerait au remplacement de celui-ci un caractère moins définitif que l’embauche d’un nouveau travailleur par un contrat à durée indéterminée »[43] .
La portée pratique de l’arrêt est considérable puisqu’avec la nécessité d’un remplacement définitif se trouve posée la question de la détermination de la date et des modalités du remplacement. La nécessité du remplacement définitif doit être avérée au moment du jour du licenciement. En revanche la Cour de cassation n’exige pas que l’employeur ait à cette date déjà remplacé l’intéressé. Ce remplacement définitif, dont la jurisprudence n’exigeait pas le visa express[44] doit intervenir dans un délai raisonnable après le licenciement. Les juges du fond l’apprécient souverainement au cas par cas en fonction des « spécificités de l’entreprise et de l’emploi concerné ainsi que des démarches faites par l’employeur en vue d’un recrutement »[45]. Il est au demeurant recommandé de faire vite et dans toute la mesure du possible de rendre concomitant l’arrivée du nouveau remplaçant et la sortie du remplacé.
Par remplacement définitif il est désormais exigé l’embauche d’un autre salarié emportant la conclusion d’un contrat à durée indéterminée, condition qui ne peut être remplie en cas de remplacement en interne ou par promotion interne.
La question se pose de savoir si l’employeur dispose d’un temps de répit lui permettant dans un premier temps de pallier l’absence grâce à un CDD pour ensuite recourir dans un délai raisonnable à une embauche définitive soit sous forme de transformation du CDD en CDI, soit dans le cadre d’une nouvelle embauche en CDI, l’une comme l’autre solution intervenant dans un délai raisonnable. Mieux vaut s’abstenir de retarder l’échéance, tant il est dangereux et aléatoire de s’en remettre à l’appréciation raisonnable du juge.
* L’âge
26. La grande chambre de la CJCE vient de décider que l’interdiction de toute discrimination fondée sur l’âge, mise en œuvre par la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 ne s’oppose pas à une réglementation nationale « en vertu de laquelle sont considérées comme valables les clauses de mises à la retraite d’office figurant dans les conventions collectives » dès lors que la mesure est justifiée par un objectif légitime relatif à la politique de l’emploi et au marché du travail et que les moyens mis en œuvre pour réaliser cet objectif d’intérêt général n’apparaissaient pas inappropriés et non nécessaires à cet effet[46]. La formule est suffisamment souple pour donner aux Etats une marge de manœuvre conséquente. Ainsi, la loi Fillon du 21 août 2003 avait autorisé la mise à la retraite d’un salarié à l’âge de 60 ans dès qu’une convention ou un accord collectif conclu à cet effet et étendu avant le 1er janvier 2008 prévoit des contreparties en termes d’emploi et de formation.
La Cour de cassation impose seulement aux juges du fond de vérifier si la conclusion d’un contrat à durée indéterminée, peu important qu’il ne vise pas au remplacement du salarié mis à la retraite est en relation avec celle-ci[47]. Il appartient à l’employeur de se réserver la preuve par tous moyens du lien de causalité entre l’embauche et la mise à la retraite.
* La perte de confiance
27. Des décisions récentes de la Cour de cassation ont conduit à s’interroger sur un «éventuel retour de la perte de confiance » en droit du travail[48]. Or dans une décision en date du 21 septembre 2006 la chambre sociale recadre les choses en l’accompagnant d’un communiqué précisant que « le licenciement pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé sur des éléments objectifs imputables à ce dernier »[49]. Les simples craintes, le seul risque d’un conflit d’intérêt ne peut donc constituer un motif valable de rupture. La décision doit certes être approuvée. Elle n’en laisse pas moins subsister une interrogation sur le contenu de l’obligation d’exécution de bonne foi du contrat de travail. N’est-il pas normal que le salarié soit tenu à une obligation de transparence sur sa situation matrimoniale quand bien même celle-ci relève de sa vie privée. L’obligation de coopération inhérente à son contrat de travail doit le conduire à informer son employeur sur tout ce qui est susceptible de troubler objectivement l’entreprise compte tenu de la nature de ses fonctions.
Tout revient à s’en remettre au juge pour définir ce qui constitue ou non un élément objectif.
b. En présence de certains types de contrats
28. Le chapitre VI du titre III du livre I de notre nouveau code du travail est entièrement consacré à la rupture de certains types de contrats dont le premier le CNE est déjà mort. Paix à ses cendres non sans avoir rappelé que de manière aussi surprenante qu’incongrue l’article 1236-1 du code du travail instituait le droit de licencier sans motif.
Le bilan désastreux de l’expérience dont les entreprises disciplinées ont malheureusement fait les frais devant les juridictions prudhommales est aujourd’hui connu. Plusieurs cours d’appel ayant conclu à la non-conformité du CNE à la convention OIT n° 158 sur le licenciement, l’ont requalifié en contrat à durée indéterminée de droit commun [50] ce qui suivant le principe des dominos entraine nécessairement la requalification de la rupture en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse faute de motivation. D’où la recommandation formulée en catastrophe par les conseils à leurs clients ayant naïvement répondu positivement aux incitations intempestives des pouvoirs publics de bien motiver la lettre de rupture et ce avant que le glas du CNE ne retentisse définitivement.
Le commentaire n’est autre que l’expression d’une immense tristesse devant l’irresponsabilité et l’inculture juridique des pouvoirs publics.
29. A l’inverse l’avenir du contrat conclu pour la durée d’un chantier n’est pas compromis. L’article L 1236-8 CT écarte, sauf dérogation conventionnelle en son alinéa 1, l’application des règles relatives au licenciement pour motif économique, pour soumettre en son alinéa second de manière quasi exclusive la rupture unilatérale à l’initiative de l’employeur au régime du licenciement pour motif personnel. La Cour de cassation précise les conditions et les modalités du licenciement pour fin de chantier qui constitue une exception au principe général selon lequel aucune clause du contrat de travail ne peut prévoir par avance un motif de licenciement échappant au contrôle de la réalité et du sérieux du motif par les juges. Dans la mesure où l’achèvement du chantier donne une cause réelle et sérieuse à la rupture du contrat conclu pour le temps du chantier[51] il est capital de pouvoir déterminer la date précise de la fin du chantier, la Cour de cassation ayant précisé que seule la fin effective du chantier légitime la rupture[52].
Pour être claire, la solution du juge n’en est pas moins redoutable pour l’employeur.
II : L’office redouté du juge
30. Le juge du fond n’a pas le choix. Il doit apprécier la régularité de la procédure suivie, contrôler le caractère réel et sérieux des motifs et forger sa conviction au vu des éléments fournis par les parties (art 1235.1 CT). Bien que souverain dans l’appréciation des faits, il reste soumis à un contrôle de motivation[53] qui s’accroit lorsqu’est reprochée au salarié une faute qualifiée.
Quel que soit l’auteur du contrôle l’employeur est soumis à l’arbitrage du juge dont les décisions peuvent parfois susciter un sentiment d’insécurité et l’inciter à expérimenter un itinéraire qui évite la rencontre du juge.
A : Le contrôle du juge
31. L’office du juge consiste à s’assurer de l’existence d’une faute et à arbitrer le règlement des comptes.
1. La pesée des fautes
Au juge est dévolu la mission de s’assurer de l’existence des reproches formulés à l’encontre du salarié puis de leur qualification.
a. L’existence de la faute
32. Pour les juges suprêmes, il importe peu que le salarié qui témoigne contre l’employeur ait également signé la lettre de licenciement[54] ou que les attestations établissant les griefs invoqués par l’employeur soient postérieures à la notification du licenciement[55].
La question s’est posée de savoir si un SMS[56] pouvait constituer ou non un mode de preuve admissible ?
Seules sont recevables les preuves obtenues de manière licite[57]. En soi, le SMS peut parfaitement être considéré comme la déclinaison technologique d’une lettre missive qui s’analyse « en un écrit émanant d’une personne et adressé à une autre personne en vue de communiquer à celle-ci les pensées ou les volontés formulées par la première, le plus souvent au moyen d’un intermédiaire qui sera ordinairement du moins, l’administration des postes »[58].
Le messager qui achemine le SMS n’est pas humain mais électronique et la lettre parvient à son destinataire dans l’instant où elle est envoyée. Mais mis à part les progrès technologiques le SMS n’est autre qu’une lettre missive électronique.
33. Quid alors de son utilisation en justice ? Les tribunaux ont largement considéré que si la lettre présente un caractère confidentiel, le destinataire ne peut la divulguer qu’avec l’accord de son auteur. La tendance s’inverse aujourd’hui. Le droit de la preuve (qui se transforme en « droit à » la preuve) prime sur le droit au secret[59].
Pour la Cour de cassation l’utilisation par le destinataire des messages écrits téléphoniquement adressés n’est pas « un procédé déloyal » dès l’instant où l’auteur ne peut ignorer qu’ils sont enregistrés par l’appareil récepteur[60]. La solution est d’autant plus intéressante que pour contester la faute grave qui lui était reprochée la salariée avait utilisé le SMS comme preuve du harcèlement sexuel dont elle était l’objet de la part de son employeur.
b. Définition de la faute grave
34. Sans la remettre fondamentalement en cause, la Cour de cassation vient d’affiner la définition prétorienne de la faute grave : « la faute grave, qui peut seule justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise »[61].
L’innovation vient de l’abandon de la référence au préavis. L’essentiel est désormais que le salarié cesse effectivement d’être physiquement présent dans l’entreprise après la constatation de la faute, qu’il soit écarté de la collectivité du travail pendant la durée de la procédure.
En revanche les effets financiers de la rupture importent peuLa faute grave n’exclut ni la rémunération de la mise à pied ni le versement de l’indemnité compensatrice de préavis. Une solution voisine avait déjà été adoptée il y a plus de dix ans. La haute juridiction a déjà considéré que le paiement de l’indemnité compensatrice de préavis n’entrainait pas renonciation à se prévaloir de la faute grave[62] dès l’instant que l’employeur s’était opposé à l’exécution du préavis[63]. La situation est désormais clarifiée : l’employeur peut se prévaloir de la faute grave même s’il a réglé au salarié les indemnités auxquelles il n’a normalement pas droit en raison de sa faute.
Suivant la formule d’un auteur la Cour de Cassation permet à la pratique d’amortir la rigueur des effets de la faute grave[64] et de faciliter le règlement des comptes.
2 Le règlement des comptes
35. L’absence de cause réelle et sérieuse rend la rupture illégitime tandis que la nullité sanctionne son invalidité. Le règlement des comptes diffère suivant que l’on se trouve en présence d’un licenciement illégitime ou invalide.
a. En présence d’un licenciement illégitime
36. Désormais c’est au visa des articles L 1234-1 à L 1234-11 CT puis des articles L 1235-1 à L 1235-6 CT que les juges règleront les conséquences et sanctionneront les irrégularités du licenciement.
Suivant en cela une solution retenue par la CJCE[65], la Cour de cassation décide que c’est la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement au salarié qui fixe le point de départ du préavis (art. L 1234-3 CT) alors que le droit à l’indemnité de licenciement nait au jour de l’envoi de la lettre de licenciement[66].
Par un arrêt du 26 septembre 2007[67], la Cour de cassation rappelle la distinction entre la naissance du droit à l’indemnité de licenciement et sa quotité, qui traduit le taux c'est-à-dire la base et le mode de calcul[68]. Il est de jurisprudence constante que le montant de l’indemnité de licenciement du salarié s’apprécie à la date d’expiration normale du délai congé qu’il soit ou non exécuté[69]. En revanche seules les dispositions légales et conventionnelles en vigueur à la date de la rupture conditionnent l’existence du droit[70] en adéquation avec la situation juridique du salarié.
37. Pour le calcul de l’indemnité légale de licenciement les années de service dans l’entreprise ainsi que les mois accomplis au-delà des années pleines doivent être pris en compte. Quid pour le calcul de l’indemnité conventionnelle lorsque la convention collective applicable ne distingue pas les années incomplètes des années entières ? L’indemnité conventionnelle ne peut être que plus favorable que l’indemnité minimum légale. La Cour de cassation prend en compte les années complètes comme les années incomplètes sans qu’il y ait lieu de distinguer là où la convention ne distingue pas[71].
Pour calculer l’indemnité due en présence d’un licenciement irrégulier le juge tient compte de l’ancienneté du salarié et de l’effectif habituellement occupé dans l’entreprise.
La cour de cassation considère que l’entreprise occupe habituellement au moins onze salariés lorsqu’elle réduit son effectif en deçà du seuil très peu de temps avant la notification du licenciement[72]. La proximité temporelle entre la réduction de l’effectif sous le seuil de 11 salariés et le licenciement suffit à considérer que l’employeur occupait habituellement 11 salariés au moins ce qui permet de dissuader les employeurs fraudeurs.
Mais qu’en est-il si l’effectif, à l’inverse, n’a atteint que très peu de temps le seuil de 11 salariés ? La suspicion de fraude s’estompe. Doit-on dans ce cas néanmoins considérer que le nombre de 11 salariés correspond à l’effectif habituel de l’entreprise ? Le doute est permis. A suivre l’arrêt du 10 octobre 2007 « cela paraît possible »[73]
Nous émettons toutefois les plus expresses réserves sur les dangers d’une extension excessive de la portée de l’arrêt. Il appartient à l’employeur d’administrer la preuve de l’effectif habituel de son entreprise. Il doit donc par tous moyens pouvoir démontrer au juge que l’atteinte du seuil d’au moins 11 salariés est occasionnelle sans que cette occasion ne puisse se retourner contre lui comme une présomption irréfragable.
L’enjeu est considérable puisqu’entre l’application ou non de l’article L 1235-3 alinéa 2 CT il conditionne la condamnation de l’employeur au remboursement aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié (art L 1235-4 CT).
b. En présence d’un licenciement invalide
38. Dans le sillage de la décision rendue le 12 janvier 2007[74], par le Conseil constitutionnel, la jurisprudence judiciaire décide que la nullité du licenciement n’est reçue que si un texte l’envisage expressément, ou si le licenciement porte atteinte à une liberté fondamentale[75]. La cour de cassation vient de préciser qu’en l’absence de disposition légale la prévoyant, la nullité d’un licenciement qui porte atteinte à la présomption d’innocence n’est pas encourue[76].
Lorsque la nullité est encourue, la jurisprudence récente confirme les difficultés que présente parfois sa mise en œuvre. Ainsi, la cour de cassation procède à une subtile distinction suivant qu’il s’agit d’indemniser le licenciement d’un salarié sans autorisation ou d’un salarié protégé dont l’autorisation est annulée.
Dans la première hypothèse la cour de cassation a décidé que la présence d’un salarié protégé licencié malgré le refus d’autorisation de l’inspecteur du travail, dont l’employeur refuse la réintégration judiciairement obtenue de lui accorder une indemnité égale à la rémunération qu’il aurait perçue jusqu’à ce que renonçant à la réintégration il prenne acte de la rupture de son contrat de travail, auquel s’ajoute les indemnités de rupture ainsi qu’une indemnité pour licenciement illicite au moins égale à celle prévue par l’article L 1235-3 du code du travail[77].
Dans la seconde hypothèse, la cour de cassation vient de répondre à deux interrogations essentielles :
- La première de savoir si en cas d’annulation de l’autorisation de licenciement le juge judiciaire retrouve pleine compétence pour statuer sur l’existence d’une cause réelle et sérieuse de licenciement ? Sur ce point, la Cour de cassation décide désormais[78] que lorsque le juge administratif annule l’autorisation accordée par l’administration considérant que les faits reprochés ne sont pas établis ou ne justifient pas la mesure de licenciement, le juge judiciaire ne peut pas retenir l’existence d’une cause réelle et sérieuse. La solution revient à ériger en forme de principe une véritable autorité de la chose jugée à « l’administratif sur le prudhommal » et de priver le juge judiciaire de toute liberté d’appréciation[79] . D’un côté d’aucuns saluent le mérite d’éviter des discordances entre les juges à l’occasion d’un même fait[80]. De l’autre on regrettera le sacrifice sur l’autel du « juridiquement correct » de l’indépendance du juge judiciaire par rapport au juge administratif.
- La seconde relative à l’étendue du préjudice subi par le salarié et à la possibilité ou non de déduire les sommes que l’intéressé avait perçues pendant la période litigieuse ? Sur l’appréciation du préjudice un arrêt rendu le 26 septembre2007 confirme la jurisprudence antérieure[81] suivant laquelle c’est la totalité du préjudice tant matériel que moral qui doit être indemnisé mais rien que le préjudice réellement subi[82].
39. Deux régimes d’indemnisation distincts coexistent suivant que le licenciement intervient sans autorisation ou en vertu d’une autorisation par la suite annulée.
Dans le premier cas l’indemnisation est forfaitaire sans pondération possible. Elle se cumule avec les revenus perçus qu’il s’agisse de la retraite[83] ou de revenus de tiers[84].
Dans le second, le juge recouvre son pouvoir modérateur. L’explication est certes rationnelle quant à la finalité poursuivie. La sanction est plus ou moins lourde en fonction de la gravité de la faute imputable à l’employeur suivant qu’il a délibérément ou non violé le statut protecteur.
Le mécanisme de l’indemnisation se révèle cependant complexe et particulièrement sévère. Il alimente la crainte du juge qui apparaît à travers l’actualité la plus récente comme un détour à éviter dans l’intérêt partagé des deux parties.
B- L’éviction du juge
40. Du côté patronal comme du côté des syndicats de salariés les voix se sont jointes de manière quasi-unanime pour promouvoir la rupture conventionnelle, comme un moyen sécurisé de rupture du contrat de travail sans encourir le risque du recours au juge.
Il n’est cependant pas certain que les promoteurs atteignent leur objectif. Le concept de séparabilité accéléré défendu par le MEDEF devient certes une réalité. Mais l’examen de son régime qui conditionne sa portée juridique suscite de nombreuses interrogations qui pourraient bien nourrir l’imagination d’esprits contestataires capables de remettre en cause la sécurité de la rupture.
1. Le régime de la rupture conventionnelle
41. Sous les articles L 1237-11 à 1237-16 CT sont posées les règles relatives aux modes de conclusion et de validité puis les droits conférés. Se pose la question du champ d’application des ruptures conventionnelles. Quid des départs négociés de type collectif dont la validité est déjà reconnue par les juges dans le cadre d’accord collectif soumis au comité d’entreprise pour un motif économique ?
Le projet de loi répond de manière incomplète précisant seulement sous l’article L 1237-16 CT que le régime de la rupture conventionnelle ne s’applique pas aux ruptures de contrat de travail résultant :
1- des accords collectifs de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, dans les conditions définies par l’article L 2242-15CT ;
2- des plans de sauvegarde de l’emploi dans les conditions définies par l’article L 1233-61 CT.
C’est beaucoup d’honneur pour la GPEC et le plan de sauvegarde. Mais il ne faudrait pas oublier que ni l’un ni l’autre n’ont le monopole des accords collectifs susceptibles de prévenir des départs négociés.
Faut-il en déduire que la voie de la rupture conventionnelle serait ouverte à certains accords et fermés pour d’autre ? Rien est moins sur. Mais tout est possible. Affaire à suivre…
a. Les conditions de validité
42.Le principe est énoncé sous l’article 1237-11 CT[85] : la rupture conventionnelle est libre. Le mécanisme mis en place est destiné à garantir le libre consentement des parties, par des règles protectrices avant et après la signature d’un document fourni sous forme de modèle par le ministère du travail.
La protection du consentement prend, en premier lieu la forme d’un droit à l’assistance lors de la négociation de la rupture. Il peut demander à être assisté « soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise qu’il s’agisse d’un salarié titulaire d’un mandat syndical ou d’un salarié membre d’une institution représentative du personnel ou tout autre salarié. Soit en l’absence de représentant du personnel dans l’entreprise par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative » (art 1237-12 CT). Le dispositif est directement emprunté des règles applicables en matière de licenciement. Il est vraisemblable que la liste des conseillers salariés déjà existante soit commune aux deux modes de rupture. L’employeur dispose d’un droit symétrique au soutien qui se trouve cependant subordonné à la condition que le salarié en fasse lui-même usage (art 1237-12 al2 CT) afin sans doute de respecter une stricte égalité de traitement. Le projet de loi voté par le Sénat le 7 mai dernier prévoit que « l'employeur peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, par une personne appartenant à son organisation syndicale d'employeurs ou par un autre employeur relevant de la même branche ».
43.« La convention fixe la date de rupture du contrat de travail qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation » (art 1237- 13 al2 CT). Une fois signée, chacune des parties dispose d’un délai de 15 jours calendaires pour exercer son droit de rétractation sous forme soit d’une lettre recommandée avec accusé de réception soit d’une lettre remise en main propre. C’est ce qui s’induit de la formulation un peu lourde du texte « Ce droit est exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie » (art 1237-13 al4 CT). La notification peut également résulter d’un acte d’huissier.
L’employeur et le salarié sont sur un pied d’égalité, chacun pouvant avoir ses raisons pour préférer poursuivre l’exécution du contrat de travail. D’où la nécessité de recommander dès à présent aux parties de prendre le temps de mesurer tous les effets de l’accord et de veiller à ce que l’information loyale la plus complète soit apportée au cours du ou des entretiens. A l’issue du délai de rétractation la partie la plus diligente adresse une demande d’homologation à l’autorité administrative avec un exemplaire de la convention (art 1237-14 CT). Ce choix peut surprendre puisqu’au cours de la négociation le MEDEF et les organisations syndicales de salariés avaient proposé d’autres modes tels qu’un procès-verbal de conciliation devant le juge ou devant un officier public ministériel (huissier ou notaire). L’idée d’une transaction homologuée par le conseil des prudhommes a également été émise. Le projet reprend l’idée retenue par l’ANI de confier l’homologation au directeur départemental du travail lequel va devoir en un temps record vu le nombre potentiel de demandes vérifier que les conditions d’assistance et d’information du droit de rétractation de l’écrit sont bien respectées. Le projet de loi est évasif quant à la détermination de l’autorité administrative compétente.
S’agit-il du Directeur Départemental du Travail de l’Emploi et de la formation professionnelle ce qui revient à inscrire l’exercice du pouvoir d’homologation dans le cadre de l’exercice des pouvoirs de décision au sein des services de l’Etat, c'est-à-dire en réalité au préfet[86] ou s’agit-il de l’inspection du travail qui bénéficie d’une véritable indépendance garantie par la convention n°81 de l’OIT ? Un amendement précisant que l’autorité administrative s’entend de l’inspection du travail serait le bienvenu.
44. A compter de sa saisine, l’autorité administrative dispose d’un délai de quinze jours pour statuer qui, faute de moyen en effectif risque très vite de se révéler trop court. D’où l’ouverture de la voie de l’homologation tacite à défaut de réponse dans le délai imparti (art 1237-14 al2 CT)[87]. Tout dépendra de l’expérimentation. Le danger est réel, en cas de surcharge, de voir les directions départementales déclarer forfait et répondre aux abonnés absents ce qui illustre ici toute la différence avec une homologation prononcée par un juge conciliateur ou un officier public ministériel.
45. Curieusement, le texte (art L 1237-14 al3CT) ne prévoit aucun délai pour faire homologuer l’accord laissant ainsi la porte ouverte à des situations juridiques inachevées faites de conventions non homologuées dès lors qu’il est prévu que la validité de la convention est justement subordonnée à son homologation (art L 1237-14 al 3 CT). Quel sort faudra-t-il réservé à ces ruptures conventionnelles atypiques ou imparfaites ? Assurément le même que celui des résiliations amiables actuelles. Le salarié ordinaire perd tous ses droits aux indemnités de rupture et aux allocations chômage. Le salarié protégé est privé de la faculté de recourir à la rupture amiable non homologuée[88].
46. Le projet de loi dans un souci d’unification et de simplification a répondu comme l’écho aux incantations d’une doctrine avisée en écartant la perspective d’un nouveau contentieux administratif de la rupture conventionnelle[89]. L’article L 1237-14 CT dispose que l’homologation ne peut faire l’objet d’un litige distinct de celui relatif à la convention : « Tout litige concernant la convention, l’homologation ou le refus d’homologation relève de la compétence du conseil des prudhommes, à l’exclusion de tout autre recours contentieux ou administratif ». Il n’est pas jusqu’à preuve du contraire dans le champ de compétence naturelle du juge prudhommal d’apprécier la légalité des décisions administratives. Il va s’en suivre une belle période d’apprentissage pour les conseillers prudhommes qui devront se former à un nouvel exercice leur permettant d’annuler des ruptures conventionnelles homologuées expressément ou tacitement par l’autorité administrative non encore identifiée.
47. Le projet de loi innove par rapport à l’accord national en accordant aux salariés protégés mentionnés aux articles L 2411-1 et L 2411-2 CT, le bénéfice de la rupture conventionnelle sous réserve de l’autorisation de l’inspecteur du travail dans les conditions requises pour le licenciement. En cas d’autorisation la rupture interviendra le lendemain. La mesure met fin au refus catégorique des résiliations amiables des contrats de travail des salariés protégés et contribue à dénouer des situations parfois inextricables solutionnées par la voie ré-ouverte de la résiliation judiciaire.
Il reste cependant à souhaiter que l’inspection du travail spécifiquement désignée procède à une enquête contradictoire aussi complète que celle qu’il accomplit en présence d’une demande d’autorisation de licenciement. A défaut le statut protecteur pourrait en ressortir sensiblement affaibli.
b. Les droits conférés
48. L’employeur est désormais tenu pour toute rupture, y compris conventionnelle, d’établir un reçu pour solde de tout compte qui après l’éclipse imposée par la loi du 17 janvier 2002 renait de ses cendres avec une faculté de dénonciation revue à l’élargissement puisque fixé à 6 mois.
Le salarié doit percevoir une indemnité de rupture conventionnelle spécifique qui ne sera pas inférieure à l’indemnité légale de licenciement prévue à l’article L 1234-9 CT.
Le projet de loi ne fait référence ni à l’indemnité de rupture interprofessionnelle unique dont le montant était annoncé comme ne pouvant être inférieur sauf dispositions conventionnelles plus favorables à partir d’un an d’ancienneté à 1/5 de mois par année d’ancienneté ni à l’assurance chômage alors que la garantie du versement des allocations constitue le gage de la réussite du mécanisme mis en place.
L’exposé des motifs précise seulement que la négociation de la convention d’assurance chômage permettra de compléter ces dispositions en matière d’accompagnement des demandeurs d’emploi. Autant dire que le Parlement est attendu sur ce point crucial qui conditionne toute la sécurité de l’édifice.
2. Sécurité de la rupture
49. Le choix des partenaires sociaux est révélateur d’un dictât : « tout sauf le juge ». La lourdeur des sanctions qu’il inflige explique sans doute son impopularité auprès des entreprises. La longueur et le coût des procédures ne fait pas recette auprès des syndicats. D’où le consensus pour l’éviter. L’objectif sera-t-il atteint ? Est-il surtout si opportun ? Le débat est ouvert tant il existe déjà des sources d’interrogation susceptibles de remettre en cause la sécurité recherchée et de raisons de parier sur le possible retour demain de celui que l’on souhaite aujourd’hui laisser sur la touche.
a. L’incertitude
50.Fallait-il légiférer si vite « au pas de charge » pour instituer un mode de rupture qui bien que quantitativement limité faute du bénéfice de l’assurance chômage existe déjà ? Les enjeux de la mobilité sont-ils si déterminant en terme de création d’emploi ? Les adeptes militent en faveur de l’expérimentation. Les sceptiques réservent le diagnostic. Une chose est certaine, l’avenir de la rupture conventionnelle dépend de l’attitude loyale ou non des futurs négociateurs. L’inquiétude peut naitre du risque d’abus et de la forme déjà programmée suivant un formulaire type. Est-il bien raisonnable à l’avance de préparer le cadre de ce qui dans la loi doit faire l’objet d’une réflexion, d’une négociation en plusieurs étapes éventuelles ?
Côté employeur, tout va dépendre des comportements de chacun, du degré de civisme, du respect de la citoyenneté du salarié par les entreprises parfois tentées de recourir à un mode rapide, à priori sécurisé, et surtout à coût réduit pour rompre le contrat d’un salarié devenu indésirable.
Côté salarié des garanties économiques apportées encore aujourd’hui incertaines quant au régime de l’assurance chômage.
Le nouveau système a un mérite indiscutable : celui de nous épargner l’hypocrisie des accords transactionnels actuels avec la signature du protocole non daté suivie de sa séquestration dans l’attente de l’envoi de la lettre recommandée et du retour de l’accusé réception pour remettre à chacun après avoir apposé la date l’exemplaire qui lui revient. Les juges n’ignorent pas l’existence de telles pratiques et ne se privent pas de les sanctionner quand l’occasion se présente notamment avec le recours à l’envoi de la feuille blanche.
Le nouveau régime de la rupture conventionnelle constitue une mesure d’assainissement salutaire.
51. Restent posées une multitudes de questions :Quid des modalités de l’assistance et de l’information des modalités de l’enquête par l’autorité administrative, de la possibilité pour cette dernière d’exercer son droit de retrait, de l’étendue du pouvoir d’homologation ? Quid aussi des ruptures conventionnelles à répétition au point de dépasser le seuil de 10 salariés pour s’épargner les désagréments d’un plan de sauvegarde de l’emploi et les risques encourus ?
Il n’est pas exclu qu’après avoir crié haro sur le juge on assiste à son retour en force. Après le flux, le reflux.
b.Le retour du juge
52. Sans détour Madame Favennec- Hery regrette la détermination déclarée à écarter le juge[90] au regard de l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. L’histoire se renouvelle sans cesse. A trop vouloir supprimer le contentieux on le régénère sous une autre forme qui pourrait bien devenir rapidement celle des vices du consentement, à raison du dol, de l’erreur, du fait d’une mauvaise information ou encore de l’erreur de droit. Le droit commun révèlera probablement encore d’autres sources de contentieux, notamment celui de l’examen de la loyauté des parties dans la conduite de la négociation, du sort réservé par le juge aux salariés protégés de tous horizons (représentants du personnel, salariés inaptes, ou femmes enceintes).
Ne va-t-on pas assister à une approche différenciée du contrôle de la convention suivant que le salarié est protégé ou non, vulnérable ou pas en vertu d’un nouvel élan du principe de la discrimination positive ? Ne va-t-on pas voir émerger une dualité des contentieux administratifs et judiciaires dans le domaine réservé des salariés protégés à raison du contentieux administratif relatif à l’autorisation de l’inspection du travail ?
53 .Le projet de loi unifie le contentieux de l’homologation sous l’article L 1237-14 al4 CT. Mais il ne prévoit pas de parallélisme de l’unification pour les salariés protégés. Le distingo de l’homologation et de l’autorisation est significatif. Rien ne change en ce qui concerne les voies de recours contre l’autorisation. On peut douter de l’intérêt d’un recours dans la mesure où les parties sont d’accord. Mais après tout, le repentir peut être actif et le recours pour excès de pouvoir n’est pas exclu.
L’homologation ne purge pas l’accord de ses vices. Son refus ou son absence ne prive pas l’accord de sa qualification de convention.
54. L’éviction du juge est en réalité toute relative et ses champs futurs d’intervention s’ouvrent à l’horizon avec la perspective exaltante d’innovation à venir et de belles décisions à commenter. D’où le regret de constater que le législateur n’ait pas songé à anticiper en prévoyant les conséquences d’une annulation d’une rupture conventionnelle alors que la rupture est consommée pouvant aller jusqu’à la demande de réintégration, ni prévu un délai de courte prescription comme en matière de licenciement.
A vouloir aller trop vite en quête d’effets d’annonce on en oublie parfois l’essentiel ou à tout le moins une partie. Mais où se trouve dans tout cela justement l’essentiel ? Dans l’espoir de voir nos vieilles habitudes se briser, notre marché du travail se moderniser à l’écoute des expériences de nos partenaires européens au final pour dynamiser l’emploi et éviter des licenciements source de drame et parfois de désespoir dans une perspective de redynamisation de notre économie chancelante. Surement ! Mais le pari doit rester prudent et le succès ou l’échec de la rupture conventionnelle dépend à coup sur de la relation de confiance devant exister entre les négociateurs qui constituent le meilleur gage de sécurité de l’accord.
Un bel hommage pour le rapport de confiance forgé sur l’enclume du respect de la personne.
[1] Ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 pour la partie législative publiée au J.O. du 13 mars 2007 et par le décret n°2008-244 du 7 mars 2008 pour la partie règlementaire.
[2] Cass.soc., 5 avr. 2006 : JCP Ed. S, 2006, n° 1412
[3] Cass.soc., 22 févr.2006, pourvoi n° 03-46086, Juris-data n°2006-032.308, JCP éd. S n° 20 J. n°1406
[5] CA Paris 18-10-2007 Bull FRS 3 p.10
[6] Cass. soc 20-12-2006 n° 44-476853 Juris data n° 2006 03-66-83 JCP. S. n°19 J. n°1349 note B. Bossu
[7] Cass. soc 22-11-2006 n°04-41-768 JCP S. n°18-2007 J. n°1316 note Th. Lahalle
[9] Cass. soc 24 janv. 2007 pourvoi n°05-42-135 ; Juris data n°2007 037060
[10] Cass. Soc., 21 mars 2007 : pourvoi n° 05-45-060 ; JCP éd. S., n°1412
[11] Cass. soc 10 juill. 2007 : pourvoi n°05-46-051 Juris data n°2007 04 0232 JCP éd S. n°1717 note L. Drai ; V.aussi Cass. soc 18 sept. 2007 : pourvoi n°06-40-795 Juris data n° 04-04, JCP éd. S, n°1780
[12] Cass. soc 26 nov 2006 n°05-40235 JCP éd.S. n°6 J. n°1081
[13] Cass. soc 11 janv. 2007 : pourvoi n°04-45250 ; JCP éd. S. n°1205 note Brissy ; V aussi Cass. soc 26 sept. 2006 : Juris data n°2006 035159, Bull civ V n°287, JCP éd. S. 2007, 1077 note D. Corrignan-Carsin
[14] Cass . soc 4 avril 2006 JCP S. n°23 J. n°1443 note P.Y Verkindt
[15] D. Autie Nouveaux aspects de la jurisprudence de la Cour de cassation à propos de la rupture abusive du contrat Dr. Soc 1956 p.156
[16] JO Débats AN 23-05-1973 p.1445, col2 et p. 1619 col 2. La cause est réelle si elle présente un caractère d’objectivité excluant les préjugés et les convenances personnelles, indépendante de la bonne ou de la mauvaise humeur de l’employeur
[17] CA. Limoges 21-03-1975 D. 1975 p.411
[18] Les faits tirés de la vie personnelle échappent normalement au pouvoir disciplinaire de l’employeur sauf lorsque le comportement du salarié compte tenu de ses fonctions et de la finalité propre de l’entreprise crée un trouble caractérisé au sein de cette dernière. Cass soc 30-11-2005 JCP S. 2006 n°4 1074 note G. Gauriou, Cass soc 25-01-2006 JCP S. 2006 n°13 n°1261 note J.Y. Frouin - Cass soc 20 nov. 1991 Bull civ V n°512).
[19] le coup violent porté par le salarié à l’employeur sans que ce comportement puisse être justifié par l’animosité existant entre les deux hommes (Cass soc 22-11-2006 n° 04-41-768 Juris data n°2006 036 208 JCP S. n°18 Cass soc 2-05-2007 JCP S n°1316)
[20] La violation par le salarié de son obligation de sécurité alors que l’employeur avait consenti à d’autres salariés une délégation de pouvoir en matière de sécurité, laissant ainsi filtrer le message insistant suivant lequel la mise en œuvre de l’article L 230-3 du CT est indépendante des mécanismes de la délégation de pouvoirs et qu’il appartient à tout salarié de prendre soin de sa sécurité et de sa santé ainsi que de celles des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions (Cass soc 6 juin 2007 n°05-43-039 JCP éd. S., n°1584) à condition d’avoir reçu au préalable une formation adaptée.
[21] L’hostilité affichée par un salarié n’ayant pas entamé de négociations avec des grévistes nonobstant les instructions de sa direction. (Cass. soc 9-10-2007 n°06-41-085 Juris data n°2007 04-08-38 JCP S. n°9 J. n°1134). Le lien de subordination impose un devoir d’obéissance, une obligation de loyauté et de réserve. L’équilibre est rompu dès l’instant où recevant des instructions pour mettre un terme à une grève le salarié refuse de les mettre en œuvre, même à raison d’un désaccord sur la méthode.
[22] Cass. soc 17 oct. 2007 : pourvoi n°06-42-555 1ère esp. ; Cass. soc 5 déc. 2007 : pourvoi n°06-41-267 2ème esp. M. Pierchon : Harcelement moral et faute grave JCP S. n°6 2008 étude pratique n°1076 p.19 et s
[23] Cass. soc 29-11-2006 n°04-47-302 JCP S. 2007 n°4 J. n°1039 -
[24] cass. soc 11-07-2007 n°06.41.706 Juris data n°2007 040-149 JCP S 2007 J. n°1668 note Puigelier ; V. aussi : St. Beal, A.L. Dodet licenciement du salarié parti en congé sans autorisation de son employeur JCP S. 2007 n°47 étude prat. Soc n°1874 p.85
[25] cass soc 3 juin 1998 Juris data n°002623 JCP éd. G, 1998 IV n°1455 ; Cass. Soc., 11 oct. 2000 : pourvoi n°98.42.540
[26] cass. soc 17.07.2007 n°06-42-935 JCP S 2007 n°48 J n°1911
[27] Cass. soc 19-09-2007 n°05-45-294 JCP S. 2007 n°42 J n°1779
[28] Cass. soc 30-05-2007 n°05-18-755 JCP S. 2007 n°39 J. n°1719
[29] Cass. soc 12-06-2007 n°05-45-320 JCP S. 2007 n°26 J. n°304
[30] La participation à une association de malfaiteurs et la détention d’armes de première catégorie ayant entraînées un placement en détention provisoire du salarié, au motif que les faits imputés relevaient de la vie personnelle du salarié et ne pouvaient lui être imputé à tort (Cass. soc 5-03-2008 n° de pourvoi 06-42-287) - Le fait de souscrire un abonnement à une revue licencieuse en donnant l’adresse de l’entreprise pour la recevoir sur son lieu de travail quelque soit le trouble objectif qui en résulte (chambre mixte 18-05-2007 JCP S. 2007 act n°256 obs. Dauxerre)
[31] La participation à une manifestation publique en dehors du temps de travail, qui constituant une liberté collective, relève de la vie personnelle dès lors que les juges ne caractérisent pas en quoi compte tenu de la fonction du salarié et de la nature de l’entreprise, le comportement peut être qualifié de fautif (Cass. soc 23-05-2007 n°05-41-374 JCP S. n°27 J. n°1510)
[32] Cass. soc 3-10-2007 06-42-121 JCP S. n°49 2007 J. n° 1938 note C. Pizzio Delaporte
[33] Cass soc 23 oct. 2007 : Dr. soc. 2008, p.126 note J.Savatier
[34] V. J. Savatier note prec. Dt social 2008 p.127
[35] Le licenciement prononcé pour inaptitude après un seul examen ne constatant pas l’existence d’un danger immédiat ou ne mentionnant pas qu’une seule visite a été effectuée en référence à l’article R 241-51-1 CT (Cass. soc 21-03-2007 n°06-41-678- RJS 5./07 n° 583) ou après deux examens médicaux non espacés du délai minimum de deux semaines (Cass. soc 3 mai 2006 Dt soc 2006 p. 800 note J. Savatier ; Cass. soc 20-09-2006 n°05-40-241 ; RJS 11/06/n°1169) est nul
[36] Cass. soc 08-06-2005 n°03-44-913 RJS 8-9/05 n°45
[37] Cass. soc 21-11-2007 06-43-875 RJS 2 08 n°136 voir étude de Ph. D’Ornano L’inaptitude du salarié études pratiques JCP S. n°42 n°1811
[38] Cass. Soc., 13 juill. 2004 pourvoi n°02. 42. 129
[39] Cass. Soc., 15 nov. 2006 : Dr. soc 2007, p.106, note J. Savatier
[40] V. J. Savatier sous arrêt du Cass. soc., 15 nov. 2006 : Dr soc 2006, p.107
[41] Cass, soc., 26-09-2007 : pourvoi n°06-40-740 JCP S. n°46 J. n°1854
[42] Cass. soc 18 oct. 2007 : Dr soc 2008 n° 127 et 128, JCP éd. S. 2007 n°1956 note D. Corrignan-Carsin
[43] J. Savatier note précitée p. 129
[44] Cass ; soc 10-11- n° 02-45-187 Juris data n°2004 0258568 Bull civ 2004 n°284 Dt soc 2005 p.225 obs J. Savatier D. 2005 p.765, Cass. soc 21-09-2005 Juris data n° 2005 029 796 ; JCP S. 2005, 1373 note T. Lahalle ; Bull civ 2005 V n°264
[45] D. Corrignan Carsin note sous arrêt du 28 octobre 2007 prec. JCP J. n°1956 p.32
[46] CJCE gd. Ch 16-10-2007 aff c 411/05 Palacios de la villa c Cortefiel Servicios SA JCP S. n°43 J. n°489 p.6)
[47] Cass. soc 18 oct. 2007 : pourvoi n°06 41586, JCP éd. S, n°507 p.11.
[48] J. Mouly Le licenciement du salarié pour des faits relevant de sa vie personnelle : le retour discret de la perte de confiance Dt soc. 2006 p.839).
[49] Cass. soc 21-09-2006 n°05-41-1555 Juris data n°2006 035026 voir communiqué www. cour de cassation.fr. Le salarié contestait son licenciement motivé par l’absence d’information de sa hiérarchie de la détention par son épouse d’une participation dans un centre nouvellement intégré au réseau de son employeur ce qui générait un risque de conflit d’intérêt.
[50] CA Paris 6-7-2007 n°06-6992 : RJS 8-9/07 n°982 ; Bordeaux 18-06-2007 n°06 4806 RJS 10/07 n°1100
[51] Cass. soc 12-02-2002 Juris data n°2002 012972 Bull civ 2002 V n°64
[52] V. Cass soc 7-02-2007 n°05 45 282 JCP S. n°16 J. n°1269 p.21, note L. Drai : à propos d’un contrat de recherche conclu avec une valeur indicative de 36 mois mais rompu 19 mois après sa conclusion pour l’employeur impayé par son client qui avait fait jouer la clause résolutoire du contrat de recherche en notifiant une mise en demeure de payer sous trois mois. Son erreur consiste à avoir notifié le licenciement pour fin de chantier avant d’avoir attendu le terme du délai de 3 mois. La Cour de cassation le sanctionne sévèrement : « le licenciement notifié à la salariée alors que le contrat de recherche était toujours en cours et que le délai imparti par la mise en demeure n’était pas expiré est sans cause réelle ni sérieuse ».
[53] Cass. soc., 10 déc. 1985 Bull civ V n°594
[54] Cass soc 4-04-2006 n°04-44-549 JCP S. n°20 J. n°1407 p.25
[55] Cass soc 31-05-2006 n°05-43-197 JCVP S. n°30 n°1615 p.24
[56] Short Message Service
[57] « Si l’employeur a le droit de contrôler et de surveiller l’activité de ses salariés pendant le temps de travail, tout enregistrement, quels qu’en soient les motifs, d’images ou de paroles à leur insu constitue un mode de preuve illicite »(Cass soc 20-11-1991 Juris data n°1991 003208, D 1992 J. p. 73 concl. Y. Chauvy). Au visa de l’article 9 du code civil « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ». Le respect de la légalité implique donc d’écarter les preuves obtenues de manière déloyale
[58] F. Geny : Des droits sur les lettres missives étudiés principalement en vue du système postal français – Sirey 1er vol. 1911 p.4
[59] P. Kayser La protection de la vie privée par le droit ; Economica PUAM 3eme édition 1995 n°67
[60] Cass. soc 23-05-2007 n°06-43-209 JCP S. n°31 J. n°1601 note B.Bossu
[61] Cass soc 27 sept. 2007 n°06-43-867 JCP S. n°49 J. n°1934 p.25 note A.Bugada
[62] Cass soc 29-10-1996 n°93-44-113 Juris data n°1996 004197, Cass soc 2-02-2005 n°02-45-748 Juris data n°2005- 026775, JSL 2005 n°163 p.8, RJS 2005 p.263
[63] Cass soc 8-01-1997 n°95 40-230 Juris data n°1997-000144.
[64] A.Bagada note préc. Sous arret Cass. soc 27 sept. 2007 JCP S.2007 J. n°1934 p.26
[65] La cour de justice des communautés européennes du 27 janvier 2005, interprétant la directive de 1998 relative aux licenciements collectifs a jugé que « l’évènement valant licenciement est constitué par la manifestation de volonté de l’employeur de résilier le contrat de travail » (CJCE, 27-01-2005, aff c-188/03 RJS 2005 n°792)
[66] Cass soc 26-09-2007 n°06-43033 Juris data n°2007 040525 JCP S. n°46 J n°1855 p.27 note F.Dumont
[67] V. supra.
[68] V.J.Y Frouin note sous Cass soc 11-01-2006 JCPS 2006 1179
[69] Cass. soc 25-11-1997 Juris data n°1997 004685, TPS 1998 comm 34 obs P.Y Verkdindt
[70] Cass soc 11-01-2006 Juris data n°2006- 031568 JCP S 2006 1179 note J.Y. Frouin
[71] Cass soc 22-02-2006 n°03 47-649 Juris data n°2006 032 316 JCP S n°23 J n°1447 p.27
[72] Cass . soc., 10-10-2007 n°06-40796 JCP S n°51 J n°1983 note S. Brissy
[73] V S. Brissy note sous arrêt prec. p.36.
[74] Cons. Const. décision n°2001-455 DC du 12-01-2002 JO 17 janvier.
[75] Cass soc 30-10-2002 Bull civ V n°331, cass soc 31-03-2004 Bull civ V n°101, cass soc 29-06-2005 JCP S 2005 n°15 1237 29 note J.Y. Frouin
[76] Cass soc 5-03-2008 n° pourvoi 07-40086
[77] Cass soc 25-01-2006 n°04-40-789 JCP S n°04-40-789 n°11 J. n°1217 p.32 note J.Y.Kerbouch
[78] Elle décidait antérieurement (depuis un arrêt du 22 mai 1995) qu’en cas d’annulation de l’autorisation administrative le juge devait rechercher si le licenciement reposait ou non sur une cause réelle et sérieuse pour décider d’allouer ou non des dommages intérêts au salarié (cass soc 22-05-1995 Juris data n°1995 001916 RJS 1995 n°796, même sens : cass soc 5-02-2002 Juris data n°2002 012820 Bull civ V n°53).
[79] Cass. soc 26 sept. 2007 n°05-49-599 JCP S n°51 J n°1987 p.43 note B.Bossu
[80] voir B.Bossu note sous arrêt prec JCP n°51 J 1987 p.45 voir aussi L. Pecaut Rivolier et Y. Struillon, le licenciement pour motif disciplinaire des salariés protégés, semaine sociale Lamy 19-11-2007 p.10
[81] Cass soc 2-05-1989 Juris data n°01289 701485 Bull civ 1989 V n°319
[82] D’où la nécessité de tenir compte en forme de déduction des sommes éventuellement perçues pendant la période litigieuse au titre d’une activité professionnelle (cass soc 2-05-2001 Juris data n°2001 009844, RJS 2001 n°894) des allocations chômage perçues (Cass soc 19-10-2005 Juris data n°2005 030346 JCP S 2005 1401 note P.Y. Verkindt RJS 2006 n°38). En l’espèce la cour de cassation s’inscrit dans la même logique en tenant compte pour apprécier le préjudice, des pensions de retraite perçues pendant la période écoulée entre le licenciement du salarié et l’expiration du délai de deux mois à compter de la décision qui comporte le droit à réintégration.
[83] Cass. soc., 10 déc. 2003 : juris data n°2003 021372, Bull civ 2003 V n°314
[84] Cass. soc., 10-10-2006 Juris data n°2006 035 345 ; JCP éd. S 2006, 1987 note J.Y Kerbouch ; Bull civ 2006 V n°297
[85] « L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre partie. Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties. »
[86] X. Pretot L’homologation de la rupture conventionnelle par l’autorité administrative Dt social 2008 p.317
[87] Le mécanisme mis en place déroge à l’article 22 de la loi N°2000 321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens qui prévoit que le silence gardé par l’autorité administrative vaut en principe décision de rejet normalement au terme d’un délai de deux mois. La formule adoptée est radicalement inverse. Elle accorde une décision positive - l’homologation – alors que le droit commun confère au silence la portée d’un rejet.
[88] Cass soc 16 mars 1999 Bull civ V n°125 ; 3-04-2001 R.J.S. 6/01 voir J.Pelissier, A. Supiot, A.Jeammaud Droit du travail précis Dalloz ed 2006 §641
[89] X. Pretot art prec p.319
[90] F. Favennec-Hery La rupture conventionnelle du contrat de travail mesure phare de l’accord Dr. social Mars 2008 p.315