Mots-clés : travail, retraite, cumul
1/ d’une part en incitant les salariés à travailler plus longtemps aux fins de remédier aux menaces qui pèsent sur le régime vieillesse et les régimes complémentaires.
2/ d’autre part en contraignant les entreprises à maintenir l’emploi des seniors.
Les mesures mises en place au titre de la première voie tendent à favoriser la prolongation d’activité du sénior et à reprendre une activité.
I – LA PROLONGATION D’ACTIVITE
Le changement de cap est clairement annoncé. Les stratégies destinées à racheter des trimestres pour bénéficier d’une retraite anticipée pour carrière longue sont déjouées. Désormais, les trimestres rachetés au titre des périodes d’études supérieures ou des années d’activités incomplètes qui ne correspondent pas à des trimestres validés au titre d’une activité professionnelle effective ne peuvent plus être pris en compte pour ouvrir droit à une retraite anticipée.
Dans le même esprit, l’âge de dispense de recherche d’emploi est augmenté. De 58 ans au 1er janvier 2009, il sera de 59 ans au 1er janvier 2010 et disparaîtra en 2012, ce qui devrait dissuader de nombreux séniors à user voire abuser de la rupture conventionnelle du contrat de travail.
A. L’ALLONGEMENT DE L’ACTIVITE PROFESSIONNELLE
L’allongement de la durée de la vie a dans tous les pays d’Europe pour corollaire l’impérative nécessité d’allonger la durée de l’activité professionnelle. C’est désormais chose faite.
La France a pris le parti d’offrir aux salariés qui le souhaitent de prolonger leur activité professionnelle jusqu’à 70 ans. L’employeur ne peut jusqu’à cet âge imposer au salarié sa mise à la retraite d’office. Il doit l’interroger par écrit trois mois avant l’âge de 65 ans sur son intention de quitter volontairement l’entreprise pour bénéficier d’une retraite à taux plein. A défaut de respecter cette obligation, l’employeur se trouve privé de la possibilité de mettre d’office le salarié à la retraite pendant l’année suivant la date du 65e anniversaire.
Le régime est marqué du sceau de la souplesse, le salarié conservant la possibilité de partir à la retraite quand il le souhaite.
Pendant les quatre années suivant le 65e anniversaire, l’employeur doit réitérer son interrogation sur les intentions du salarié. Ce n’est qu’au 70e anniversaire que l’employeur recouvre le droit de mettre d’office le salarié à la retraite.
Curieusement, le nouveau dispositif ne prévoit pas de sanction du non respect par l’employeur de l’interrogation préalable avant 70 ans. Nul doute qu’un tel manquement expose l’auteur récalcitrant au risque de se voir condamner à la suite d’une requalification de la rupture en licenciement abusif ou sans cause réelle ni sérieuse, à une indemnité qui ne saurait être inférieure à six mois pour les salariés ayant plus de deux ans d’ancienneté et travaillant dans une entreprise de plus de dix salariés ou en fonction du préjudice subi pour les autres.
Il est même possible de considérer que le licenciement serait entaché de nullité pour discrimination à raison de l’âge au nom du non respect du principe du maintien dans l’emploi des séniors.
Il n’en demeure pas moins toujours possible de partir à 60 ans si les conditions du taux plein sont remplies en cas de préretraite progressive ou préretraite CATS ayant pris effet avant le 1er janvier 2010, préretraite d’entreprise mise en place antérieurement à la publication de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites ayant pris effet avant le 1er janvier 2010.
Le législateur aurait été bien inspiré de revisiter à l’occasion de l’allongement de l’âge de départ en retraite le régime des indemnités de mise à la retraite lorsque l’initiative incombe à l’employeur et de départ à la retraite lorsque l’initiative incombe au salarié.
En principe :
- Dans le premier cas le salarié perçoit l’indemnité de mise à la retraite au minimum égale à l’indemnité légale ou l’indemnité conventionnelle si elle est supérieure
- Dans le second cas le salarié perçoit l’indemnité de départ à la retraite qui est nettement plus faible, soit en l’absence d’indemnité conventionnelle plus favorable :
· Un demi-mois après 10 ans d’ancienneté
· Un mois après 15 ans d’ancienneté
· Un mois et demi après 20 ans d’ancienneté
· Deux mois après 30 ans d’ancienneté
Mais le nouveau dispositif, faute de précision, fait planer un doute qui conduit certains auteurs à considérer que l’employeur devrait verser les indemnités normalement dues en cas de mise à la retraite en cas de demande préalable suivie d’une réponse positive dans la tranche 65 [70 ans. Il reviendra au Juge la mission d’apporter une réponse claire à l’interrogation pour lever définitivement le doute.
B. L’INCITATION FINANCIERE
Il existe une prime au maintien qui prend la forme d’une augmentation du taux de la surcote demeurée jusqu’à présent depuis la loi Fillon du 21 août 2003 insuffisante pour inciter les salariés à rester travailler plus longtemps.
A partir du 1er avril 2009, en application de l’article 5 du décret n° 2008-1509 du 30 décembre 2008 modifiant l’article D 351-1-4 du code de la sécurité sociale, la majoration est portée à un taux unique de 1,25 % pour chaque trimestre cotisé à compter du 1er janvier 2009, soit 5 % par an au lieu jusqu’à présent de :
- 0,75 % du premier au quatrième trimestre de surcote
- 1 % au-delà du quatrième trimestre
- 1,25 % au-delà de 65 ans
Pour les retraites liquidées à compter du 1er avril 2009, la surcote n’est pas incluse dans le montant calculé de la retraite avec le minimum contributif. Il faut ajouter désormais la surcote au montant calculé de la retraite augmenté du minimum contributif éventuellement majoré au titre des périodes cotisées (Circ. CNAV n° 2009/17 16 fév. 2009).
II – LA REPRISE D’ACTIVITE
Le retour à l’emploi des séniors constitue la mesure phare de la loi du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009 sous la forme d’un cumul emploi retraite corrigé, c’est-à-dire facilité.
Depuis le 1er janvier 2009, les séniors peuvent cumuler intégralement leur pension de retraite de base avec le revenu d’une activité professionnelle sous trois conditions cumulatives :
1/ conclusion d’un nouveau contrat de travail en cas de reprise d’activité au service du dernier employeur.
2/ liquidation de toutes les retraites personnelles des régimes légalement obligatoires de base et complémentaires dont a pu relever l’assuré auprès des régimes français et étrangers ainsi qu’auprès des régimes propres aux organisations internationales (circ. CNAV 13 mars 2009 n° 2009/45 pt 233).
3/ être âgé d’au moins 65 ans ou âgé d’au moins 60 ans et avoir une carrière complète.
La réforme fait donc disparaître les contraintes tant en termes de délai que de plafond revenu. Fini le délai de six mois qu’il fallait jusqu’à la réforme respecter entre la date de prise d’effet de la retraite et la date de reprise d’activité chez le nouvel employeur. De même, il n’existe plus de plafond revenu tel qu’il était fixé à l’alinéa 2 des articles L 161-22 et L 634-6 et L 643-6 du code de la sécurité sociale.
Les règles nouvelles applicables dans les régimes de base sont transposées aux régimes AGIRC et ARRCO à compter du 1er janvier 2009.
A côté du dispositif autorisant un cumul sans limites de ressources pour les assurés qui remplissent toutes les conditions précédentes, il existe une seconde version permettant un cumul retraite nouvel emploi mais avec limites de ressources de 160% du SMIC ou du dernier salaire ou du salaire moyen des dix dernières années pour les allocataires :
1/ qui fond liquider leur pension de base avec abattement avant 65 ans dès lors qu’ils ne réunissent pas la totalité des trimestres au titre de la durée d’assurance
2/ à 60 ans au titre de l’inaptitude sans remplir la condition d’assurance
3/ de moins de 60 ans titulaires d’une pension vieillesse au titre d’une carrière longue ou d’un handicap
4/ n’ayant pas liquidé l’ensemble de leurs droits.
Conclusion
La panoplie est large. Le dispositif nouveau est marqué du sceau de la souplesse. La finalité est claire et le processus irréversible. Les séniors doivent travailler plus longtemps si l’on veut sauvegarder et même sauver l’assurance retraite et le régime par répartition menacé par l’allongement de la durée de la vie d’une part et l’augmentation corrélative des inactifs supportée par les actifs.
Partant d’une analyse lucide de la situation économique fragile et d’une démographie insuffisante, il faut savoir positiver. Nous serons vieux de plus en plus tard !
Vincent COTTEREAU
Avocat au barreau de TOURS
Spécialisé en droit social